Généralement, la réécriture/correction n’est pas une étape que les écrivain.e.s accueillent avec des cris de joie. Je vous propose ici, une autre manière de la voir, qui la rende presque tout le temps agréable. Elle est issue de ma manière d’opérer et elle ne vous conviendra peut-être pas ! Vous me direz.
Une étape qui peut faire peur
La réécriture ou étape de la correction, – qu’elle prenne place immédiatement après l’écriture du premier jet ou après des retours de bêta-lecture – est l’une des étapes essentielles de l’écriture d’un roman, mais, à mon sens, elle désigne mal ce dont elle parle réellement.
La correction évoque des travaux scolaires de corrections orthographiques, des lignes rouges sur les cahiers. La réécriture, quant à elle, suggère un recommencement, comme s’il fallait tout reprendre à zéro. Bernard Werber le fait, comme il l’explique ici (à 1 min 26), et ça m’a angoissée la première fois que je l’ai entendu donner ce conseil…
Or, elle désigne bien plus que ça. Parfois elle demande de reconsidérer la structure même du texte, de vérifier l’évolution des personnages, d’améliorer le rythme…
Sans tout détruire !
Souvent c’est une étape que je suis heureuse de commencer, mais dont j’appréhende les effets : je crains de briser l’architecture de mon texte, de faire s’effondrer l’ensemble, pire de modifier le sens de l’histoire que je voulais transmettre.
Parce que la réécriture est une étape délicate où l’on peut être amené à réécrire ou effacer des passages entiers sans fragiliser l’ensemble, mieux en en renforçant les effets.
Cela demande une assurance et un recul qu’il n’est pas toujours facile d’avoir.
D’où l’intérêt des bêta-lectures. Avant l’envoi, si je perçois un élément vraiment embêtant, je corrige et j’améliore mon texte du mieux que je peux, mais je sais que la plus grosse partie de la réécriture aura lieu après les bêta-lectures.
La réécriture après les bêta-lectures.
Après analyse des retours de mes bêta-lecteurs, j’établis un plan d’action.
Je regroupe les idées qui se ressemblent pour ne pas corriger au fil du texte et risquer de me lasser.
Ce n’est pas toujours facile d’analyser ces retours. Déjà, il s’agit de les apprécier à leur juste valeur, de les digérer parfois et d’en tirer ce qui sera bon pour notre texte (si l’art de la bêta-lecture t’intéresse, je t’offre un guide avec une fiche méthode et des astuces pour gérer les retours).
J’aime faire le point entre les remarques et les reformuler à ma façon, en fonction de ce qui me semble nécessaire pour mon texte.
Je te donne un exemple pour être plus claire. J’ai eu, un jour, un retour où la bêta-lectrice me disait qu’elle avait adoré les jeux de lumière et de couleur au début de mon texte, mais qu’il lui semblait qu’ils manquaient à la fin. Une autre m’expliquait qu’à la fin du texte, elle avait du mal à visualiser les lieux.
J’en ai conclu qu’il fallait que je travaille sur le CADRE : que j’ajoute ou non de la lumière et des couleurs, que je précise ou pas dans quel lieu on se trouvait, je faisais ce que je voulais, du moment que j’améliorais le cadre qui était le point commun entre ces deux remarques.
Et j’adore opérer ainsi : me demander ce que je tire de deux remarques qui, a priori, semblent d’abord éloignées.
Et je ne garde que les remarques qui me semblent cohérentes avec mon projet.
La réécriture impressionniste
Cela me permet de faire un plan de correction non linéaire, de faire des allers-retours dans mon texte et de tromper l’ennui.
De m’amuser finalement, sans avoir à tout gérer d’un coup.
Ces ajouts de détails par-ci, par-là, qui éclaircissent tel ou tel point, donnent du corps et de la consistance au tout, me font penser aux touches des peintres impressionnistes.
Parce que la réécriture est un art délicat, qui permet de tisser des fils pour faire tenir le tout, je l’assimile aussi à de la dentelle.
À force de trop retravailler un texte, on peut, en effet, le briser et le dénaturer. Il s’agit donc de ne pas le briser, lui, mais de modifier notre manière de le penser, de faire, en quelque sorte, un pas de côté, pour gérer les allers-retours entre ce qu’il était, à la fin du 1er jet, et que l’on veut garder, parce que c’est réussi, ce qu’on doit améliorer pour que ce texte devienne la meilleure version de lui-même.
C’est un exercice délicat parce qu’il demande d’aller au bout de ce qu’on peut faire et, peut-être (ce n’est que mon avis), de s’arrêter juste avant la perfection de peur de briser la finesse de l’ouvrage.
Cette fin est sans doute un peu trop lyrique ! Je l’assume, parce que j’ai vraiment cette sensation d’un travail d’orfèvre qui sera mené à son terme lors des corrections éditoriales, si votre texte trouve preneur (ou si vous choisissez de faire appel à un éditeur freelance, comme ici, pour vous auto-éditer).